Robert Mermet, les « Rouges » se sont éteint
Les camions rouges de Robert Mermet, c’est fini. L’entreprise de Marnaz créée en 1972 a vu sa chair vendue aux enchères aux fêtes de Noël.
65 personnes ont dû chercher du travail. Un coup de massue plus que symbolique dans une filière qui continue de souffrir.
Le maire voisin de Scionzier Maurice Gradel a eu une pensée émue lors de ses voeux à la population, début janvier. Au-delà de ses harangues habituelles, il s’est permis un mot à propos de la fin des camions rouges, perdus au champ d’honneur et vendus, pour une partie, à des concurrents étrangers d’Europe de l’Est.
L’entreprise frère des « Bleus » de Jean-Claude Mermet a fermé boutique avant le tournant de l’année. « Je peux vous dire que ça fait bizarre ! », commente un transporteur de la vallée, qui ajoute : « Si JCL* venait à tomber, ce sont deux mastodontes qui seraient partis en peu de temps. » JCL ne va pas bien, pas plus que Mory-Ducros*. Il y a un an et demi, Delerce, à La Roche-sur-Foron, avait aussi fermé ses portes.
Ironie cruelle du sort, un transporteur a aperçu un camion Mermet rouge en Italie, quelques jours plus tard, « qui allait au fin fonds de l’Europe ».
Ce sont une trentaine de semi-remorques, une vingtaine de camions et divers matériels qui se sont ainsi égayés dans la nature, chez des concurrents français, ou d’Europe de l’Est pour une quinzaine de véhicules pas parmi les plus récents.
La cata à l’automne 2008
Philippe Mermet, qui a vu l’entreprise familiale qu’il menait couper le contact, lançait en avril dernier dans ces mêmes colonnes un cri d’alarme sur le thème « se regrouper ou mourir ».
Aujourd’hui, il reprend le fil des problèmes. « Lorsque la crise a frappé en septembre 2008, nous venions d’investir dans du matériel, de nouveaux camions pour du renouvellement. Or de septembre à décembre 2008, on a perdu 47 % de volumes, la vraie cata. Ça a repris petit à petit au bout d’un an, mais cela n’a jamais atteint les proportions d’origine. » En 2007 – 2008, l’entreprise, sur ses différents sites de Marnaz, Corbas, Marseille, Colmar et Toulouse totalisait près de 140 personnes. Après son placement en redressement judiciaire en avril suivant, Robert Mermet s’est séparé en deux vagues d’une cinquantaine puis d’une trentaine de personnes.
Restait avant la fermeture 45 employés sur Marnaz (le site de Toulouse, qui fait de l’interrégional, demeure). Philippe Mermet précise que « très peu de personnes sont restées « sur le carreau ». Pas mal ont pu retrouver un volant, ont pris leur retraite, ont changé de travail. Cinq n’ont pas retrouvé je crois et sont en formation ».
Il se veut fataliste sur la fin de l’histoire.
« Quand c’est la crise, que vous avez une dette à rembourser et que le chiffre n’évolue pas, ça ne peut pas marcher. On a essayé de survivre, on a cherché des repreneurs. Il y avait des confrères qui étaient prêts à y aller, mais dans les grandes directions personne n’a voulu se « mouiller ». » De plus, les camionneurs étrangers ont désormais droit au cabotage. « Ils peuvent charger 15 t sur la Pologne et ensuite trois à Strasbourg en passant ! Avec des prix, et des coûts humains, qui ne sont pas les mêmes. Tous les week-ends il y a des chauffeurs qui dorment ici en attendant un éventuel chargement… » La Haute-Savoie a perdu une centaine d’emplois dans le transport en 2013, alors que jusque-là, la région avait plutôt été épargnée.
DAVID GOSSART *Lire ci-dessous